Malgré la promesse de campagne de François Mitterrand en 1981
L’illusion de 1981 : L’arrivée au pouvoir du Parti socialiste
L’arrivée de la gauche au pouvoir a donné un moment d’illusion aux électeurs de gauche et aux personnes issues des quartiers populaires qui croyaient à un changement radical. Malheureusement la situation économique et sociale des habitants des quartiers populaires n’a pas changé.
Le bilan des années Mitterrand en matière d’immigration est marqué par des évolutions contrastées, oscillant entre des mesures progressistes et des durcissements face aux pressions politiques et sociales.
1981-1983 : une politique d’ouverture
François Mitterrand, élu en 1981, initie une politique plus favorable aux immigrés. Son gouvernement procède à une régularisation massive de 130 000 étrangers en situation irrégulière, supprime la loi Bonnet et l’aide au retour, et facilite le regroupement familial.
L’annulation de la prime d’aide au retour marque un changement symbolique par rapport à la politique restrictive des années précédentes.
Le droit pour les étrangers de crée des associations à permis la création de radios locales, ouvrant la voie à des médias créés par des immigrés ou personnes issues de l’immigration.
La proposition d’accorder le droit de vote aux élections municipales aux immigrés après cinq ans de présence sur le territoire français. Cette promesse figurait à la 80eme position des 110 propositions pour la France du candidat socialiste.
Le ministre des Relations extérieures Claude Cheysson a annoncé qu’un projet de loi serait rapidement déposé. Cependant, cette annonce a déclenché une vive opposition de la part de la droite, notamment du RPR dirigé par Jacques Chirac.
Face à cette contestation, le gouvernement socialiste a commencé à temporiser. François Autain, secrétaire d’État chargé des immigrés, a déclaré que ce droit devait être "l’aboutissement d’un long processus d’insertion", sans préciser de délai.
1983-1991 : revirement et durcissement
À partir de 1983, face à la montée du Front national et aux tensions économiques, les gouvernements Mauroy puis Fabius adoptent une posture plus restrictive. Les contrôles d’identité se multiplient pour lutter contre l’immigration clandestine.
La montée de l’extrême droite marque un tournant. L’ouverture des médias publics au Front National, stratégie visant à diviser la droite a contribué à la montée du parti d’extrême-droite qui a remporté sa première ville Dreux en mars 1983. C’est la première victoire électorale du Front national, le thème de la campagne électorale de l’extrême droite c’est l’immigration.
Droit de vote des étrangers
Malgré la promesse de campagne (proposition n°40), le droit de vote des immigrés aux élections locales n’a pas été mis en place sous Mitterrand. Ce n’est qu’en 2001 que les ressortissants de l’Union européenne ont pu voter aux élections municipales en France. Ce n’est pas le cas des immigrés issus des anciens territoires « français ».
Les principaux obstacles invoqués étaient la nécessité de modifier la Constitution et le manque de soutien de l’opinion publique.
Cette promesse non tenue est devenue un symbole du reniement en politique.
Cette persistance reflète les tensions autour des questions d’immigration et de citoyenneté dans la société française contemporaine.
En 1984, la loi n° 84-622 a instauré un titre unique de séjour de dix ans, dissocié du titre de travail. Parallèlement, le gouvernement a proposé à nouveau une aide à la réinsertion des travailleurs étrangers dans leur pays d’origine.
La création de SOS Racisme en 1984 est une tentative de contrecarrer les mouvements autonomes issus de l’immigration, notamment ceux portés par la jeunesse des quartiers populaires.
Bien que la marche de 1983 ait mis en avant des revendications sociales et politiques spécifiques, telles que le droit de vote des immigrés et l’égalité des droits, SOS Racisme se concentre sur un message plus consensuel autour du multiculturalisme et du « vivre ensemble ».
Jacques Attali, dans son ouvrage Verbatim, affirme que l’association a été créée avec le soutien direct de l’Élysée pour canaliser les luttes antiracistes dans une direction plus institutionnelle.
L’introduction de la proportionnelle a permis l’entrée du Front National au Parlement en 1986.
Les gouvernements Mauroy puis Fabius ont durci les contrôles et les vérifications d’identité pour lutter contre l’immigration clandestine avec la mise en place de charters collectifs pour expulser les étrangers en situation irrégulière.
Changement de discours : le premier ministre Pierre Mauroy a qualifié les travailleurs immigrés participant aux grèves de l’automobile en 1983-1984 de "moudjahidines", marquant un contraste avec l’accueil favorable fait précédemment aux jeunes issus de l’immigration lors de la marche le 3 décembre 1983.
En 1991, sous le gouvernement Cresson, des mesures perçues comme un durcissement sont mises en place : création du visa de transit, restrictions sur le droit d’asile et lutte contre le travail clandestin. Cependant, seules 15 000 régularisations sont effectuées sur les 100 000 déboutés du droit d’asile.
L’immigration devient un sujet central dans le débat public avec l’apparition du Front national comme force politique influente.
Le bilan des années Mitterrand oscille entre une volonté initiale d’humaniser la politique migratoire et un durcissement progressif dicté par les contraintes économiques et politiques. Si des avancées ont été réalisées (régularisations massives, facilitation des conditions de séjour), elles ont été atténuées par des mesures restrictives dans un contexte marqué par la montée du chômage et des tensions sociales.